Trompettiste, violoniste, compositrice, cheffe d’orchestre, cette touche-à-tout surdouée fait swinguer le Studio 104 avec son quartet, autour de son nouvel album intitulé Try !
Lauréate du prix Django-Reinhardt de l’Académie du jazz et des Victoires du jazz dans la catégorie « Révélation instrumentale », Airelle Besson est une figure de proue d’un jazz français moderne et créatif. Son jeu caractéristique à la fois nuancé et puissant, son goût affirmé pour la mélodie et le phrasé ont fait d’elle l’une des artistes les plus demandées de la scène européenne. Trompettiste, bugliste, violoniste, compositrice, productrice, arrangeuse et cheffe d’orchestre, Airelle Besson se définit humblement comme « musicienne ».
Dès l’âge de quatre ans, Airelle se prend de passion pour la trompette : « A moins d’avoir été inconsciemment marquée par un vinyle de Maurice André qu’écoutait mon grand-père, je ne m’explique toujours pas cette évidence ». A huit ans, fraîchement débarquée à Oxford avec ses parents, Airelle ajoute une corde à son arc en apprenant le violon avec Kato Havas, disciple de Yehudi Menuhin. De retour en France, à onze ans, elle découvre le jazz lors d’un stage au festival de Cluny. Sans pour autant délaisser le classique, elle fait ses premiers pas dans l’improvisation auprès de Roger Guérin (ancien trompettiste des orchestres de Quincy Jones et Dizzy Gillespie) puis intègre le département jazz du CNSMD de Paris.
En 2002, dès sa sortie du Conservatoire (avec mention très bien à l'unanimité), Airelle entre dans la cour des grands, faisant ses classes au sein des plus prestigieux big bands français (le Gros Cube, l’Orchestre national de Jazz, le Big Band Lumière, le Sacre du Tympan et le X’tet). Elle s’associe alors au saxophoniste Sylvain Rifflet pour créer et co-diriger Rockingchair, un quintet aux couleurs rock et électronique à la tête duquel elle décroche le prix de composition, celui de soliste et le premier prix de groupe au Concours de La Défense. En 2014, dans un autre registre et une tonalité plus intime, Airelle Besson forme un duo acoustique, éthéré et poétique avec le guitariste Nelson Veras.
De son cursus classique, Airelle a gardé un profond attachement pour le grand répertoire, comme en témoigne son album Aïrès, où elle reprend en trio des morceaux de Tchaïkovski, Fauré, Bach et Ravel. C’est aussi ce qui la conduit à se former à la direction d’orchestre, auprès de Nicolas Brochot : « Au tout premier cours, il nous a annoncé que six mois plus tard, on allait devoir diriger par cœur une des symphonies londoniennes de Haydn. Cela me semblait totalement inenvisageable, mais Nicolas nous a livré les clefs pour y parvenir, et cette expérience a été extraordinairement enrichissante ». Depuis lors, Airelle Besson reçoit régulièrement des commandes pour grand orchestre, comme celles de l’Orchestre national de Lyon en 2012, de Radio France en 2017, pour l’Euroradio Jazz Orchestra, de l’Orchestre National de Metz en 2021 et, plus récemment, de l’Orchestre des 3eme cycles du Conservatoire du 13ème, à Paris.
Airelle Besson avait déjà partagé la scène avec nombre d’artistes réputés (Charlie Haden, Carla Bley, Michel Portal, Philip Catherine, Rhoda Scott, Daniel Humair, Baptiste Trotignon, Henri Texier, Youn Sun Nah) lorsqu’elle fonde, en 2014, son propre quartet composé de Benjamin Moussay aux claviers, Fabrice Moreau à la batterie et Isabel Sörling ou Lynn Cassiers au chant. Point de contrebasse, donc, dans ce quartet mais des claviers atmosphériques en guise de basse qui, se mariant à la rondeur de la trompette, au caractère quasi aérien de la voix et à la délicatesse de la batterie, contribuent à créer un son unique – on serait presque tentée de parler d’un « Airelle Be son ». Après Radio One paru en 2016, le quartet publie un deuxième opus, Try !, enregistré en pleine pandémie : « Nous n’avons pas vraiment pu répéter avant d’entrer en studio, à cause du covid, mais le jour-j, chacun a spontanément apporté ses idées, son propre son, sa patte, et la magie a tout de suite opéré, sans doute parce qu’on se connaît très bien et qu’on s’écoute énormément ». Des amis de longue date, qui improvisent au service d’un son de groupe ; fraternité, liberté, égalité : nourri de tels principes, le jazz français a de beaux jours devant lui !
Marjolaine Portier-Kaltenbach